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Alice Clavier

Face au putsch, le combat du peuple soudanais pour sa liberté

Au Soudan, le 25 octobre 2021, un coup d’Etat à la tête duquel se trouvait le général Al-Burhane a plongé le pays dans le chaos. Le fragile équilibre formé par l’alliance entre civils et militaires pour diriger le pays depuis la chute du dictateur islamo-militaire Omar Al-Bachir le 11 avril 2019 s’est rompu.



Avant le putsch du 25 octobre


En 2019, le régime dictatorial d’Omar Al-Bachir est renversé. En attendant le retour au calme et à l’équilibre du pays, le pouvoir est alors partagé entre l’armée et un groupe de civils.


Mais progressivement, l’armée s’est emparée d’un pan de l’économie qui a fini par échapper au contrôle du ministère des finances. Peu à peu, l’armée a cherché à réduire les responsabilités du gouvernement civil, pour tenter, en définitive, de l’éjecter de l’exercice du pouvoir.


En septembre 2021, le Soudan est encore affaibli par son impopularité sur la scène internationale et par la crise économique. Des officiers et civils liés à l’ancien régime d’Omar Al-Bachir, voulant profiter de ce moment de faiblesse particulier pour revenir à l’ordre ancien, ont tenté infructueusement, le 21 septembre 2021, de mener un coup d’État.


Cet évènement est l’excuse que l’armée attendait pour pointer du doigt la « mauvaise gouvernance » d’Abdallah Hamdok, à la tête du parti civil du gouvernement de transition. Le général Al-Burhan appelle alors à la dissolution de ce gouvernement pour apaiser les tensions. Mais le Premier ministre soudanais refuse.


Quand l’armée arrache le pouvoir civil


Ce refus a lieu le 14 octobre 2021. Le 16 octobre, des partisans de l’armée se réunissent devant le palais présidentiel pour exiger un coup d’État militaire, encourageant le général Burhan à prendre la tête du pays. Le 21 octobre, des dizaines de milliers de citoyens ont défilé dans les rues pour soutenir le gouvernement de transition et pour exiger une anticipation du transfert de la présidence du Conseil de souveraineté aux civils, transfert qui devait officiellement avoir lieu le 16 novembre.


Quatre jours plus tard, les membres civils du gouvernement de transition, dont le Premier ministre Hamdok, sont arrêtés, Internet est coupé, les chaînes de télévision sont prises d’assaut par l’armée, et le général Abdel Fattah Al-Burhane annonce la dissolution des instances de transition. Le seul canal d’information qui subsiste : les communiqués du ministère de l’information sur Facebook.


Les militaires semblent déterminés à prolonger cette période de chaos jusqu’au coup d’arrêt de la démocratie tout juste naissante au Soudan.



« Le peuple est plus fort »


Dès lors, des manifestations dispersées dans une quarantaine de villes, rassemblant parfois des dizaines de milliers de citoyens ont dénoncé ce coup d’État. Le 30 octobre, ils ont défilé dans les rues de Khartoum lors d’un rassemblement appelé « la Marche du million ». Ils suivent l’appel du Premier ministre, des Forces pour la liberté et le changement (FLC), du syndicat des médecins, des banques et des enseignants qui ont appelé à la désobéissance civile et à la grève générale. Le syndicat des médecins indique que depuis le début des contestations, l’armée a fait 12 morts et près de 300 blessés parmi les civils.


Les civils refusent de revenir à une alliance entre autocratie, militaires et islamistes radicaux. En dépit de l’état d’urgence décrété le 25 octobre 2021, ils continuent de défiler dans les rues en criant d’une seule voix : « Le peuple est plus fort, et le retour en arrière impossible » ! Ils espèrent la libération d’Hamdok qui incarne le visage civil de ce gouvernement, et qui représente le combat en faveur de la démocratie. Ce dernier a pu rencontrer des diplomates depuis son arrestation.


«Le monde les regarde »


Le Conseil de sécurité de l’ONU se dit préoccupé « face à la prise de pouvoir militaire » et, de même que les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Arabie saoudite et les Émirats Arabes Unis, demandent le rétablissement d’un « gouvernement de transition dirigé par des civils ». De même, la Ligue arabe exprime son « inquiétude » et exhorte au « dialogue ». Néanmoins, le Caire, que d’aucuns soupçonnent de soutenir les militaires putschistes, n’a pas joint sa voix à celles de ces pays.


Plusieurs pays ont requis une session spéciale du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU consacrée à la situation du Soudan, où les répressions militaires tendent à devenir de plus en plus violentes.

Enfin, les États-Unis ont immédiatement suspendu leur aide financière envers le pays à la suite du putsch, afin de contraindre le général Al-Burhane à accéder à la demande des plus grands acteurs mondiaux.


« Les dirigeants militaires ne doivent pas s’y tromper, déclare Amnesty International. Le monde les regarde, et ne tolérera pas plus de sang. »



Photo 1 : Unplash

Photo 2 : Killian Tassoni, Wikimedia Commons, No change made, Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0


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