Par Marine Testé
Le parlement espagnol légalise l’euthanasie
Le 18 mars 2021, le gouvernement espagnol a approuvé la légalisation de l’euthanasie, une loi chère au gouvernement de Pedro Sanchez, président du parti socialiste ouvrier en Espagne. La loi a été approuvée par la chambre basse du parlement par une majorité de 202 députés sur 350, et devrait entrer en vigueur trois mois après. L’euthanasie sera prise en charge par le système public de santé.
C’est le quatrième pays européen, et le sixième dans le monde à dépénaliser cette pratique controversée, rejoignant les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, le Canada et la Nouvelle-Zélande.
Le parlement portugais avait également voté pour une loi légalisant l’euthanasie en janvier dernier mais la Cour constitutionnelle a retoqué le texte.
Dans les pays où la pratique de l’euthanasie est légale, cela représente entre 1 et 4% des décès annuels.
Une loi encadrée par des conditions strictes
La loi stipule que toute personne ayant « une maladie grave et incurable » ou bien « des douleurs chroniques le plaçant dans une situation d’incapacité » peut alors avoir recours à l’euthanasie afin d’éviter « une souffrance intolérable ».
Cependant, la personne doit être « capable et consciente » lors de sa demande.
La demande doit se faire à l’écrit et sans pression extérieure. Elle doit être renouvelée 15 jours plus tard.
Bien que cela fût retiré du titre de la loi, ceci règlemente non seulement l’euthanasie, c’est-à-dire lorsque le soignant provoque la mort du patient, mais également le suicide médicalement assisté. Lors de cette pratique, le patient se donne la mort lui-même en ingérant une substance prescrite par un professionnel de la santé.
Il est également inscrit que si un professionnel de santé ne souhaite pas prendre part à la procédure, il pourra se retirer du processus en vertu de son « objection de conscience ».
Une décision controversée
Si de nombreux Espagnols se réjouissent de la décision, défendant le « droit à mourir dignement », l’Église s’insurge.
Les partisans de cette réforme se justifient en plaidant le droit de mourir dignement pour une personne atteinte d’une maladie incurable.
Pour le président de l’association pour le droit à mourir dans la dignité, Javier Velasco, cette loi est une bénédiction qui « épargnera beaucoup de souffrances à beaucoup de personnes, car même si peu d’euthanasies seront demandées, la loi bénéficiera à toute la société. », faisant référence aux proches des malades.
Les catholiques, la droite et l’extrême droite s’unissent, dénonçant « une forme d’homicide ».
Lourdes Méndez, de l’extrême droite, s'offusque que le gouvernement développe une « culture de l’élimination et de la mort ». Le parti VOX, d’extrême droite, a déclaré faire appel de la loi devant la Cour constitutionnelle et a annoncé qu’il abrogerait la loi s’il parvenait au pouvoir.
L’euthanasie en Europe
L’Union Européenne est muette face à la question de la légalisation de l’euthanasie, on observe donc des législations totalement différentes sans harmonisation européenne.
Le premier pays au monde à avoir légalisé l’euthanasie dans le monde est les Pays-Bas, et le premier à l’avoir légalisé chez les mineurs, mais soumis à l’accord des deux parents, est la Belgique. L’Espagne et de Luxembourg ont également autorisé l’euthanasie.
Certains pays, comme la France, ont pris la décision d’autorisé l’euthanasie dite « passive » qui consiste en une abstention thérapeutique. En effet, depuis 2016, la loi Claeys-Leonetti instaure un droit à la « sédation » des traitements pour les malades en phase terminale.
Le Danemark, l’Italie, l’Allemagne et le Portugal reconnaissent également l’euthanasie passive en autorisant le refus des soins par les patients.
Cependant dans d’autres pays comme la Grèce, la Roumanie, la Pologne ou l’Irlande, l’euthanasie est interdite sous toutes ses formes. Dans ces pays, cette pratique est passible de prison, voire punie au même titre qu’un homicide.
Un tourisme médical en voie de développement ?
En plus d’être la pionnière en termes d’offre de techniques de procréation assistée, notamment pour les femmes célibataires et lesbiennes, l’Espagne s’inscrit maintenant parmi les premiers pays à pratiquer l’euthanasie.
Dans l’Institut Valencien de la Fertilité, l’un des plus grands centres de procréation assistée en Europe, 20% des prestations ont été réalisées pour des femmes non espagnoles.
Cela a donc développé une nouvelle sorte de tourisme : le tourisme médical, des femmes qui ne viennent plus seulement à la recherche du soleil mais également d’une grossesse.
Il est donc naturel de se demander si la même expérience ne va pas se réitérer avec la légalisation de l’euthanasie.
Crédit photo 1 : HazteOir.org/ Wikimedia Commons, no change made / Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0
Crédit photo 2 : Pool Moncloa / Borja Puig de la Bellacasa/ Wikimedia Commons, no change made / Ministry of the Presidency. Government of Spain
Comments