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Alice Desvilles

« La guerre contre les médias » menée par Janez Jansa en Slovénie

Par Grégoire Pradelle


Le 3 mars 2020, la Slovénie a élu à la tête de son gouvernement Janez Jansa, candidat du parti démocrate slovène (SDS), un parti de droite slovène. Il a rapidement été surnommé « Maréchal Twitto » , pour ces nombreuses joutes sur Twitter. Il mène dans son pays ce qu’il appelle « une guerre contre les médias » à grands coups d’hashtags.



Qui est Janez Jansa ?


Né en 1958, Janez Jansa est sous-lieutenant dans l’armée yougoslave (la Slovénie était alors encore rattachée à la Yougoslavie). Il débute sa carrière dans la politique après avoir transmis un document classé secret militaire à un journal, remettant en cause l'armée alors très influente. Cela lui vaudra la prison, cependant il en ressortira comme un héros slovène. Il devient ensuite ministre de la Défense, un poste alors difficile, car il doit s’occuper de la guerre d’indépendance de la Slovénie. Puis il sera pris dans un scandale militaire et sera démis quatre ans après.


Jansa revient sur la scène politique en 2004 peu de temps après l’entrée de la Slovénie dans l’Union Européenne et à l’ONU. Ce retour se fait via le parti SDS (situé au centre droit de l’échiquier politique de l’époque) et il devient alors chef du gouvernement. En 2008 il prend la présidence tournante du Conseil de l’Union Européenne, mais perd la même année son titre de chef du gouvernement.

Il retrouvera la position de chef du gouvernement en 2012, mais sera démis de ses fonctions et envoyé en prison en 2014 pour une affaire de corruption lors de l’achat de véhicules blindés datant de 2006. La cour constitutionnelle le libérera après neuf mois de prison.


Il retrouve une fois de plus le pouvoir en 2020 lors d’une élection anticipée où lui et son parti ont réussi à former une coalition. Il admire le style politique de l’ex-président américain Donald Trump et commence à raffoler de ses méthodes de communication politique.


Sa guerre contre les médias


Jansa est particulièrement virulent dans ces attaques via twitter : il n’hésite pas à accuser des chaînes de télévision de « mise en danger de la vie d’autrui » lorsqu’une d’entre elles avait couvert des manifestations anti-pouvoir. Il utilise des hashtags tels que #presstitué, #fakenews ou encore #pravda afin de rallier ses sympathisants contre les médias. Il semble aux personnalités qui le déstabilisent avec des attaques personnelles, ce fut notamment le cas en 2016 lorsqu’il a qualifié deux journalistes ayant enquêté sur son parti de « prostitués à la retraite ».


Janez Jansa

Mais ces attaques ne s’arrêtent pas simplement à des tweets virulents. En effet, le gouvernement a bloqué les subventions de l’une des principales agences de presse du pays, la STA, justifiant ce blocage par la mauvaise transmission des données détaillant le nombre d’interviews conduites, ainsi que des analyses comparatives de leur durée. Cette action a été interprétée par la rédactrice en chef de cette agence comme une tentative de prendre la main sur l’agence.


Cependant, il semble qu’une majorité des journalistes du pays résiste face aux attaques; pour preuve une étude controversée financée par le gouvernement cherchant à justifier le combat mené par Jansa montre qu’une majorité des citoyens continue de lire des médias indépendants et que les médias liés au gouvernement ne concentrent qu’une petite minorité des audiences.


Le regard des autres Etats membres de l’Union Européenne


La politique menée par Jansa rejoint sur de nombreux points la politique menée par Viktor Orban en Europe. Des proches de celui-ci financent d’ailleurs plusieurs sources de presse pro-gouvernement en Slovénie; ils ont même participé au financement de la campagne de Jansa en 2020.


En Europe, de nombreux pays voient d’un très mauvais œil le rapprochement avec la Hongrie de Viktor Orban et « la guerre contre les médias » est généralement critiquée au sein de l'Union. À l’exemple, l’eurodéputé libéral belge Guy Verhofstadt qui s’était inquiété de la liberté de la presse en Slovénie et qui avait alors été qualifié de « chef d’une puissance coloniale » par Janez Jansa.


Cette situation est une fois de plus révélatrice d’une problématique croissante au sein de l’Union, celle définie par Pierre-André Taguieff, sous le nom de « populisme d’extrême droite » avec comme figure de proue Viktor Orban.


Crédit photo 1 : Hladnikm / Wikimedia Commons, no change made / Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0

Crédit photo 2 : Culturaldiplomacy/ Wikimedia Commons, no change made / Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0


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