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Le parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne placé sous surveillance policière

Par Rita Sidki


A quelques mois des élections législatives en Allemagne, le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) est mis sous surveillance policière. Il est accusé d’avoir porté atteinte à l’ordre démocratique du pays. L’Office fédéral de protection de la Constitution (BfV), le service chargé du renseignement intérieur, a placé le parti parmi les « cas suspects ». Cette mesure autorise la surveillance des communications de l’AfD et la possibilité d’introduire des informateurs dans ses rangs.

Affiche de campagne pour le parti Alternative pour l'Allemagne lors d'un rassemblement.

Les faits


La décision est devenue effective le 25 février, mais la BfV n’a pas pu s’exprimer publiquement sur le sujet pour cause des procédures judiciaires dans lesquelles elle est impliquée. Les faits ont toutefois été dévoilés par plusieurs médias allemands à partir du mercredi 3 mars.


Le BfV a eu besoin de l’accord de la commission G10 pour mettre en place cette décision. Cette instance découle de l’article 10 de la loi fondamentale de 1949 qui autorise l’accès aux conversations téléphoniques en cas de « menace à l’ordre constitutionnel libéral et démocratique ». La commission G10 dépend du Bundestag. Elle se réunit une fois par mois et est composée de quatre membres nommés par les partis politiques. Elle répertorie les mouvements dont les activités sont considérées menaçantes pour l’ordre démocratique du pays. La Jungue Alternative, l’organisation de la jeunesse de l’AfD, ainsi que l’Aile, le courant le plus radical du parti proche de la mouvance néonazie, faisaient déjà partie de la liste. Désormais, l’ensemble du parti et ses 32 000 adhérents font partie de la liste.


Réactions des élus politiques


L’un des porte-paroles du groupe CDU-CSU au Bundestag, Mathias Middelberg, a déclaré que « la mise sous surveillance de l’AfD n’est pas surprenante, étant donné que ce parti n’a pas coupé les ponts avec ses éléments les plus extrémistes ».

Le président du Conseil central des Juifs d’Allemagne, Josef Schuster, a approuvé la décision qu’il qualifie comme confirmant « la menace que représente l’AfD pour nos structures démocratiques ».


Les dirigeants de l’AfD ont déposé plusieurs plaintes contre le BfV auprès du tribunal administratif de Cologne. Ils ont dénoncé la décision qu’ils qualifient de "purement politique" et "scandaleuse". La mise sous surveillance signifie que les responsables locaux et nationaux du parti peuvent être mis sur écoute téléphonique et que des informateurs pourraient infiltrer ses rangs. La surveillance ne concerne cependant pas les députés du parti au Bundestag ni les candidats aux élections régionales et nationales à venir.

Manifestations des membres du parti Alternative pour l'Allemagne.

Des incertitudes concernant l’élection législative à venir


Alternative pour l’Allemagne (Alternative für Deutschland) est un parti politique eurosceptique et nationaliste créé en 2013, à la suite des politiques mises en place pour faire face à la crise de la dette dans la zone euro. Il se présentait initialement comme opposé à la zone euro, mais pas à l’Union Européenne. Depuis 2015 et la crise migratoire en Europe, il adopte des positions anti-immigration et anti-islam. Lors des dernières élections législatives de 2017, l’AfD s’est imposé comme la troisième force politique en Allemagne en comptabilisant 12,6% des voix. Il incarne aujourd’hui la première force d'opposition aux conservateurs d'Angela Merkel et aux sociaux-démocrates avec 89 députés au Bundestag.


Le parti connaissait déjà des tensions ces derniers temps. L’ancien porte-parole du parti, Christian Lüth, a été au centre d’une polémique en février. Il a été filmé en caméra cachée déclarant qu’il faudrait « abattre » ou « gazer » les réfugiés lors d’une conversation informelle. La vidéo ensuite diffusée dans les médias a généré un véritable scandale qui s’est soldé par son exclusion du parti.


De plus, les divisions entre « modérés » et « radicaux » s’accentuent. Lors d’un congrès du parti en novembre 2020, le président du parti Jörg Meuthen a exprimé sa désapprobation vis-à-vis de certaines figures du parti qui feraient régner une atmosphère « toujours plus agressive, toujours plus brutale et toujours plus désinhibé » selon ses propos. Il s’en est également pris aux membres qui qualifiaient la stratégie gouvernementale de lutte contre la pandémie de « corona-dictature ». A la suite de ces déclarations, un membre de l’aile radicale du parti a proposé une motion de défiance contre le président du parti. Elle a recueilli 47% des voix. Enfin, le parti n’a toujours pas de chef de file pour conduire la campagne pour les législatives.


Crédit photo 1 : Metropolico.org, Wikimedia Commons, no change made, Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0 Generic license.

Crédit photo 2 : Ziko van Dijk, Wikimedia Commons, no change made / Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license.

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